15.4.2023 Après le rappel sur les soins du cuir, direction mon objectif réel: teindre mes récups de cuir divers.
Pourquoi ce long résumé cuir et soins, sur un site de teintures végétales? J'ai besoin des produits précités avant la teinture, car j'envisage de bien nettoyer le cuir, puis de le teindre - tout comme on décatit bien un tissu, même ancien, pour qu'il prenne bien les colorants.
L'objectif est de réaliser des vetements, des livres-objets ou des sacs en "upcycling". Mes cuirs de récup' sont soit noirs et bruns (fleur), soit colorés bleu vert ou rouge (daim alias nubuck, vieilles jambières d'équitation). Lors de ma passion pour les livres d'artiste, j'avais acheté de la peau entière. J'ai un peu de cuir clair (daim et fleur, en tout 1m2 +-). Ce sont ces morceaux-là que je vais teindre.
Matière: comme il s'agit de récup', je ne sais s'il s'agit de cuir tanné végétal (aux tanins) ou tanné chrome; s'il est imprégné d'huile lors du tannage ou pas. Je ne peux donc me fier au teintures à l'eau que je fais d'habitude.
Dans le doute, je vais tenter des teintures à l'alcool. Eh oui, chers amis, on peut extraire du colorant dans de l'alcool (ce qu'on fait avec l'orcanette, quand on n'utilise pas la méthode de monobain acide de Garcia).
Les pros du cuir teintent désormais aux waterstains, aux teintures aqueuses ou alcool. Plus personne ne joue du végétal. Je n'ai pas encore trouvé de piste valable pour les teintures en couleurs végétales (à part des guignols, tu m'étonnes, on est sur internet...). J'ai un peu cherché sur GallicaBNF, j'ai cherché dans le Dominique Cardon et dans d'autres livres de teintures. En vain.
On commence le premier test en cuve ordinaire d'indigo: en plusieurs passages, pour un effet dégradé. Je passerai ensuite un linge imbibé d'eau vinaigrée, pour neutraliser cet alcalcin. Et je devrai bien sûr renourrir le cuir (HPB très peu puis crème). Je vérifierai ces choix avec Michel Garcia.
Je testerai en cuve au fer, qui devrait donner des tons plus foncés puisque le cuir a parfois encore des traces de tanin (le cas du tannage végétal, qui fait 10% de la production mondiale).
J'ai récupéré chez Emmaüs un blouson en cuir souple, en bon état général, pour un prix défiant l'entendement. Il a vécu, aux épaules on voit bien un peu de décoloration, mais il fait encore bonne figure. J'ai testé de le renoircir avec de l'encre maison. J'ai tapoté au pinceau les zones dégarnies: ça semblait trop mauve. J'ai tout de même ciré avec mon cirage transparent fait maison: photo sous peu, c'est enfin bien noir. Hélas! débutante, j'ai ciré le fil de couture aussi. C'est pas mal, mais ça détone. Je serai plus prudente pour la suite.
Dans le Cardon, pas d'index pour cuir, mais elle cite les emplois de chaque teinture sur cuir, lorsque la trace historique en témoigne. Pas d'infos sur le travail préalable du cuir. Donc, direction le livre "Couleurs végétales" de Michel Garcia, page 60, dont le discours confirme mon soupçon: comme le cuir est passé par des tanins pour le tannage, il est prémordancé, en quelque sorte (cela ne vaut pas pour les cuirs tannés au chrome, qui font le plus gros volume de production: je testerai en dessinant un trait de sulfate de fer pour voir la réaction).
Michel propose par exemple de passer le cuir dans la cuve d'indigo, le cas échéant en masquant certaines zones de réserve au ruban adhésif. Il suggère aussi de peindre à main levée en solution de sulfate de fer, pour des noirs.
Pour d'autres tons, je mordancerai à nouveau. Il y aura de la garance bien sûr, vu mon amour du rouge.
Je testerai
* un nuançage au jus de café très dense
* au bouillon d'oignons
* au bouillon de roseaux des canaux de Nieuport
Technique 1 - tiède : à la garance préextraite et aux noix de galle précuites au bouillon pendant 20 minutes; je laisserai le cuir en casserole, sans chauffer plus haut que 35°C, ce qui endommagerait le cuir. De toute façon, les couleurs ainsi obtenues ne seront pas nuancées au fer en post-bain, car elles griseraient trop, à cause de la teneur en tanins.
Technique 2 - froid : je le laisserais deux jours à froid, peut-être, dans une solution où j'aurai déjà extrait par chaleur les tanins des noix de galle et le rouge de la garance - en le remuant de temps en temps?
Technique 3 - froid : j'appliquerais une solution d'alun à l'éponge, je laisserais sécher avant de teindre – sans fixer, et tant pis si un peu d'alun est perdu au passage. Ensuite, une application au pinceau de gel de colorant (jus de teinture hyperdense, gélifié à la gomme). OK?
Technique 4 - alcool: faire un extrait de colorant (garance) à l'alcool pendant 48 heures; mélanger 1/1 à de l'eau; le tamponner sur le cuir. Fixation?
Je navigue un peu à vue. Je retiens que le cuir n'aime pas l'eau ou tout au moins qu'il sèche en prenant la forme humide; qu'il n'aime pas les pH excessifs; qu'il aime encore moins la chaleur > 30°C (je répète ce que j'ai lu, mais avouez que ça paraît bizarre quand on sait les températures dans le désert... Aucun mongol n'avait du cuir? Aucun nomade? )
La vaporisation est exclue, le bouillon comme pour les textiles aussi. Je demanderai à ... devinez? Michel Garcia.